Jackpot pour les salarié.e.s de la Redoute : en février 2023, le millier de salarié.e.s qui avaient accepté d’investir leurs propres deniers pour relancer l’entreprise ont perçu la somme de 100 000 euros chacun. Un bel exemple de réussite pour l’actionnariat salarié, un modèle que nous défendons bec et ongles après avoir ouvert 34,16% du capital de Shodo à nos collaborateurs.trices*. On vous explique pourquoi.
Depuis le lancement de Shodo, nous avons à cœur de transformer le modèle de l’ESN pour plus de justice sociale. Avant même d’ouvrir le capital de l’entreprise, nous redistribuions en moyenne 85% du chiffre d’affaires sous forme de salaire et congés supplémentaires. A l’époque, nous avions l’impression de déjà “faire bien”. Alors, pourquoi décider de pousser le bouchon encore plus loin ? “Tout est parti d’une discussion avec un indépendant qui a challengé notre modèle. Il nous a demandé pourquoi nous n’ouvrions pas le capital à nos salarié.e.s. On a défendu notre bout de gras, mais en réalité, sur le chemin du retour, nous n’étions pas très à l’aise”, se souvient Guillaume, cofondateur.
Un tien vaut mieux que deux tu l’auras !
Alors, le sujet trotte dans la tête de nos deux fondateurs qui décident de solliciter leur avocate. Au départ, le modèle des BSPCE est mis sur la table. Vaste sujet… et surtout, vaste fumisterie ? De notre côté, nous estimons que ce modèle ne correspond pas à l’idée de partage et de transparence du modèle Shodo.
Le problème des BSPCE, c’est qu’il faut les acheter, et leur coût d’acquisition peut être prohibitif. Sans compter que beaucoup de dirigeants de startups font miroiter de beaux exits pour proposer des salaires moins compétitifs.
L’autre défaut des BSPCE selon le duo, c’est qu’ils n’ouvrent aucun pouvoir de décision pour les salarié.e.s détenteurs.trices. Bref, pas le bon mode opératoire pour coller à l’état d’esprit de Shodo.
“Notre philosophie, c’est que la confiance ne se gagne pas : elle se donne d’emblée”, lance Guillaume.
C’est pourquoi les deux associés ont opté pour une autre voie : donner directement des actions aux Shodoers contre une somme symbolique.
À l’époque, nous ne comptions que 30 collaborateurs. L’objectif était que chaque salarié.e détienne 1% de la société. Pour nous, le modèle a trois vertus :
- Lorsque l’on est actionnaire, on acquiert du pouvoir de décision et plus de transparence (participation aux AG, partage d’informations stratégiques etc).
- Le fait d’être actionnaire permet de profiter de dividendes quand la société s’en verse.
- En cas d’exit, l’actionnaire bénéficie de cette vente au prorata du capital qu’il détient.
Surtout, fait important : l’ouverture au capital n’est pas venue amputer la rémunération fixe et tous les avantages des salarié.e.s, tout comme les congés supplémentaires. En aucun cas, il n’est question d’exercer une forme de “chantage” sur le salaire !
Une entreprise devenue ingouvernable ?
Ouvrir 34,16% de son capital aux salarié.e.s est-ce un coup de folie ? Dans la tête de nombreux entrepreneurs.neuses, il y a de grands risques que cela dérape. Mais nous pouvons vous l’assurer : au quotidien, notre gouvernance se passe très bien.
Déjà, parce qu’avec 55% du capital, deux des 4 fondateurs disposent de suffisamment de voix pour faire passer les décisions ordinaires de l’entreprise. Pas question que la gouvernance au jour le jour soit aussi complexe qu’un vote au Parlement européen !
Pour tout ce qui concerne les décisions extraordinaires en revanche, les salarié.e.s sont consulté.e.s. Il peut s’agir d’un changement de siège social, d’un déménagement ou encore d’une fusion-acquisition.
D’ailleurs, nous avons récemment vécu notre première prise de décision extraordinaire en faisant entrer 30 nouveaux salarié.e.s au capital, exigeant que les détenteurs.trices actuel.le.s se diluent. Et ils et elles ont dit oui !
Nous voyons dans cette gouvernance partagée un atout non négligeable : en cas de désaccord entre les associé.e.s, les salarié.e.s ont le pouvoir de trancher et d’arbitrer. “Au final, la boîte se gouverne avec davantage de sérénité opérationnelle”, affirme Jonathan.
Une petite précision s’impose cependant : tous les salarié.e.s ne sont pas convoqué.e.s en AG. Ils et elles votent au préalable au sein de l’assemblée de Shodo Community, la structure qui détient les titres des salarié.e.s.
Et qu’en est-il de ceux qui voudraient se faire du pognon ?
Hormis la question de la gouvernance, on entend souvent une autre objection de la part des dirigeant.e.s : “on a cravaché au démarrage, pris des risques, alors pourquoi les gains ne devraient pas nous revenir en intégralité en cas de succès ?”
“Déjà, je crois qu’il faut minimiser cette prise de risque. Bien sûr, les dirigeant.e.s n’ont pas les mêmes responsabilités. Pour autant, en détenant 55% du capital, nous estimons être déjà largement récompensés, sans oublier que les dirigeant.e.s viennent généralement de milieux aisés et éduqués où la prise de risques est finalement relative”, estime Jonathan.
Et quid des salarié.e.s ? L’avantage du modèle des BSPCE est que les premiers arrivants peuvent faire un bel exit si la valeur de leurs parts augmente. Avec le modèle de l’actionnariat salarié tel que Shodo le conçoit, le partage des bénéfices se fait pour les salarié.e.s actuellement en poste.
Autrement dit, quand un.e salarié.e quitte la structure, il.elle cède ses parts au profit du.de la nouvel.le arrivant.e, qui les achètera au même prix que le premier. On voit donc que la logique est un poil différente.
Bref, l’actionnariat salarié chez Shodo, c’est un état d’esprit visant à partager la valeur créée à un instant T. L’idée n’est pas de capitaliser sur une revente future (même si détenir 34,16% d’une entreprise valorisée potentiellement à plusieurs dizaines de millions d’euros, ce n’est pas rien).
Ce que nous cherchons avant tout, c’est à mettre en place un système sain et vertueux pour tous. On assiste aujourd’hui à un débat de fond sur la ventilation de la valeur et du profit.
Pour nous, l’actionnariat salarié participe à cette redistribution.
Sans oublier le plus important : donner du pouvoir de décision aux salarié.e.s pour que les fondateurs n’aient pas droit de vie ou de mort sur l’entreprise.
Car la vraie richesse d’une société, ce sont ses collaborateurs.
C’est cliché mais tellement vrai. Alors à l’actionnariat, salariés !
*Tous les salarié.e.s de Shodo, qu’il s’agisse de la maison mère ou des filiales, sont associé.e.s à leur structure selon un pourcentage et un mode opératoire différent.